J’ai reçu une question sur les balades mathématiques : comment organiser au mieux ? Alors voilà comment je m’y prends, et ce n’est évidemment que ma façon de procéder mais qui s’appuie sur de nombreuses expériences, de la maternelle au lycée.
En amont, pour le prof
D’abord, il faut s’entraîner : l’enseignant a tout intérêt à faire lui-même sa balade, tout seul, en famille ou entre collègues. Cette prébalade a plusieurs objectifs : développer son propre regard mathématique, trouver des exemples de situations à proposer aux élèves sans inspiration immédiate et trouver des supports pour tous les domaines des maths scolaires (et pas qu’en nombres et calculs, ou en espace et géométrie, ou en grandeurs et mesures). De plus, cette prébalade est l’occasion de trouver des trajets alternatifs si besoin : comment raccourcir, rallonger la balade, par où passer au retour pour changer de l’aller par exemple.
L’organisation pratique
Ahlala, ce n’est pas ma partie préférée, mais elle est cruciale : sans elle, impossible de réaliser quoi ce que ce soit. Il va falloir penser aux autorisations de sortie, à quel matériel pour prendre les photos (les téléphones des élèves ? Mais en ont-ils tous? Et s’il y a de la casse, pas glop ; ou alors des tablettes du collège ?), à comment la classe va être répartie en groupes (pour une balade, on peut aller plus loin que pour des travaux en classe : des groupes de 5 sont envisageables). Il faut aussi penser aux accompagnateurs : combien, qui ? Il sera nécessaire d’ailleurs d’expliquer le principe et les règles de la balade aux accompagnateurs aussi, pour que leurs interventions soient productives et compatibles avec nos objectifs. Enfin, il faut prévoir un plan B s’il pleut trop fort.
La préparation en classe
Demander aux élèves de trouver des situations de problèmes dans leur environnement n’est possible que s’ils ont compris ce qu’est un problème, et qu’ils ont une culture des problèmes en maths. Sans un répertoire suffisamment développé régulièrement, l’exercice risque d’être périlleux et frustrant pour tout le monde.
Pour bien préparer le moment de la balade, je propose d’abord, dans l’année, des photo-problèmes façon maths en vie, d’abord avec des consignes que j’ai posées, et plus tard en inventant des consignes. C’est un très bon préalable, qui garantit une véritable activité mathématique le jour de la balade. Lorsque les élèves inventent des consignes, nous parlons beaucoup de l’explicite : il faut des consignes compréhensible par toutes et tous, et c’est clairement le plus difficile à atteindre. Mais en le travaillant de façon détendue, on progresse rapidement, en s’amusant. Travailler ainsi sur le langage et la faon dont on est assuré d’être compris par autrui est crucial pour l’avenir de nos jeunes.
Je montre aussi aux élèves des photos prises les années précédentes, mal cadrées ou floues. Prendre correctement une photo qui traduit ce que l’ont veut montrer n’est pas si simple.
Avant de partir, il reste encore des points à préciser : le droit à l’image doit absolument être clair pour tout le monde. On en prend pas de photo des camarades, même s’ils sont d’accord, même « pour rigoler », point. Même chose avec les passants. Et puis dehors, on véhicule l’image de chacune, de chacun, de l’enseignant et de l’établissement, alors on se tient bien ! Enfin, il est toujours utile de repréciser qu’on part faire des maths. Et d’ailleurs, c’est quoi, faire des maths ? prenez donc le temps de poser la question aux élèves, d’écouter leurs propositions et de vous trouver votre réponse. C’est très instructif.
Tout juste avant de partir, pensez à emmener une ficelle, une règle ou, mieux, un tasseau, une équerre de tableau. C’est pratique pour indiquer des informations sans avoir à les rajouter de façon plus ou moins artificielle sous forme de consigne écrite, qui doit être limitée au maximum.
Une fois dehors
Les élèves sont par groupe, et on n’opère aucun échange. Si possible il y a un adulte par groupe, et de toute façon l’enseignant responsable limite les déplacements de façon à toujours avoir tout le monde en visuel, à portée de voix et d’intervention rapide.
Pour ma part, j’ai une règle : lorsqu’un groupe a une idée, il doit en faire part à son adulte référent. Ainsi, les élèves sont obligés de la formuler, de verbaliser, et l’adulte peut ou non autoriser la photo. Je dis non à une bonne photo mise en mots de façon incompréhensible, ou à une intuition pas mise en mots du tout. Car l’objectif n’est pas de ramener des photos (ça, je peux le faire moi-même), mais des associations photo-consigne qui soient déjà le résultat d’une activité mathématique, et en permette une autre : la résolution de problèmes.
Et après ?
Les élèves pourront opérer une sélection, mais je conseille à l’enseignant de faire un premier tri. Ensuite, on va constituer un répertoire de problèmes, avec des consignes, et les faire résoudre par les groupes qui n’ont pas pris cette photo-là. Echanger avec une autre classe est aussi très sympa. En fait, après, c’est encore toute une aventure. Mais la question portait sur l’organisation, alors je réponds à la question !