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La didactique et les non didacticien(ne)s

Hier, j’ai assisté à la journée hommage aux travaux de Rémi Brissiaud à Paris. Lors de cette journée, nous avons écouté des interventions de didacticien(ne)s. Lors des pauses, j’ai eu l’occasion d’échanger avec des personnes de métiers variés, mais qui toutes et tous étaient intéressé(e)s et concerné(e)s par Rémi, ce qui constitue un sérieux point commun. J’ai été frappée par le rejet vraiment très fort des interventions très « didactique pure », disons, par une partie des spectateurs.

Ce qui m’a intéressée, c’est que les personnes qui rejetaient vertement ces interventions ne le faisaient pas parce qu’elles ne les ont pas comprises : ce sont des personnes cultivées et agiles du point de vue de l’enseignement des maths. Elles pouvaient débattre sans problème du contenu que nous venions d’entendre. Mais ces interventions leur ont semblé complètement déconnectées de la réalité : la réalité des classes, des anciens élèves, des professionnel(le)s et des parents qu’elles et ils sont. Je ne partage pas leur point de vue, mais je suis d’accord avec certains des éléments évoqués, et nous avons pu débattre de façon intéressante (pour moi) de ce que nous avions ressenti, réfléchi, compris. Je n’ai moi-même pas uniquement des expériences didactiques positives, mais la virulence de la charge contre les chercheuses et chercheurs en didactique m’a surprise : leurs reproches ne s’adressait pas à la didactique en tant que discipline, mais à celles et ceux qui en sont professionnel(le)s de façon « exclusive ». Un de mes camarades a même jugé « grave » que la formation des enseignants leur soit confiée dans les INSPE, identifiant un risque de déstabiliser et de contre-outiller les jeunes du métier.

Michel Fayol avait justement évoqué cette fracture entre les métiers de la recherche en didactique : ceux de la didactique « pure », et ceux des personnes comme Rémi Brissiaud, décrit comme davantage tourné vers le terrain, plus côté outils que côté modélisation, même si en fait Rémi était aussi du côté modélisation selon moi. Mais c’est vrai, chez Rémi, si la démarche de recherche était rigoureuse et structurée, il était guidé par des principes de réalité, pour rendre utilisables ses outils dans nos classes. En tout cas, cette fracture, elle est considérable. Je la comprends, car j’ai essayé sans succès de me tourner vers la didactique. J’ai rapidement échoué : je suis « trop de terrain », sans doute, ou peut-être ai-je trop besoin de gigoter, je ne sais pas. Pour autant, la didactique, ses apports, ses ressources et ses professionnel(le)s me sont indispensables pour me nourrir et corriger, améliorer, faire évoluer ma pratique, au filtre de ma personnalité professionnelle et de mes besoins.

M’enfin, ça m’a scotchée quand même, ces échanges. C’est triste de travailler sur l’enseignement des maths et de ne pas se comprendre les uns les autres. Car en effet, certains autres ne comprennent pas non plus les uns, clairement. Heureusement cette incompréhension mutuelle n’est pas générale. Parce que je pense que nous avons besoin les uns des autres, et qu’unir nos forces est indispensable.

2 réflexions au sujet de « La didactique et les non didacticien(ne)s »

  1. C’est un débat classique : les physiciens théoriciens « pervertissent-ils » les jeunes et vaillants expérimentateurs ?
    C’est un schéma épistémologique qu’on maitrise bien normalement : une partie de la discipline fournit des modèles qu’on espère explicatif et une autre la met à l’épreuve de l’expérience. C’est la méthode heuristique. Si le modèle explicatif n’est pas suffisamment prédictif il est supplanté par un meilleur.
    Le problème est que si les modèles sont rejetés par les expérimentateurs, soit
    Ils ont des modèles parfaits (ce dont je doute), soit ils reproduisent des schémas dépassés. Ce n’est pas forcément très grave pour les élèves au quotidien mais c’est très mauvais pour l’enseignement de la discipline en général.
    Le fait que les futurs praticiens (qui ne seront pas nécessairement expérimentateurs conscients) soient exposés aux modèles en développement ne paraît pas fou. Si cet apprentissage n’est pas exclusif . Normalement, il y a plus de 30% des cours assurés par des praticiens (profs en poste dans le primaire ou le secondaire).
    Si les modèles semblent pas réaliste, il faut publier les résultats expérimentaux les mettant en défaut. C’est comme ça que ça avance.

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