Après A., qui m’a bien retournée, Nadia aussi m’a toute émue. J’avais écrit que j’avais conseillé à nos enfants de ne pas devenir enseignants, et, connaissant ma foi en ce métier, vous avez été plusieurs à réagir. Nadia m’a autorisé à reproduire ses propos ici.
Je te lis de façon très irrégulière (quand j’ai le temps…) et aujourd’hui j’avais envie de lire autre chose que ce que j’entends depuis ce matin à la télé alors je suis allée faire un tour sur ton blog. Mais contre toute attente, après avoir lu ton article, je me sens encore plus triste…
Je bosse dans le collège qui se trouve à 5min à pied de l’église où le prêtre s’est fait assassiner il y a quelques années… alors je vois à quoi tu fais référence Claire lorsque tu parles d’hyper-violence. Pas dans mon établissement attention, les gamins sont SUPER, mais dans “l’autour”, dans la folie et la cruauté de quelques personnes ignares qui se prennent pour Dieu… Mais, justement Claire, plus que jamais l’école a un rôle primordial ! Et c’est bien en ce sens que c’est un métier d’avenir au contraire !
L’année dernière j’étais PP d’une classe de 6ème et j’avais en charge un élève décrit par son ancienne maîtresse comme très violent. En effet, les bagarres dans la cour de récréation se sont vite succédées. J’ai réussi à instaurer une relation de confiance avec cet élève (et sa famille) et progressivement, grâce au suivi que l’on a mis en place avec le CPE, son comportement s’est très nettement amélioré. Un matin, il est venu me chercher dans la salle des profs pendant la récréation pour me dire : « Madame, Untel est en train de se moquer de moi et de continuer à m’embêter alors que je lui ai déjà dit d’arrêter. Faites quelque chose Madame s’il vous plait, parce que là, si il continue, je vais finir par lui casser la figure.» Quelle fierté j’ai ressenti à ce moment-là ! Cet élève qui avait l’habitude de tout régler à coup de poings et de se faire justice lui-même, avait enfin suffisamment confiance dans l’adulte pour le solliciter avant d’utiliser ses poings pour régler les conflits ! Quelle victoire ! Et quel plaisir aussi nous avons ressenti avec ma Principale Adjointe lorsqu’au conseil de classe du 2ème trimestre, nous avons proposé les Encouragements qui ont été validés par l’équipe au complet ! Alors pourquoi priver tes enfants de ressentir ces sentiments s’ils voulaient un jour devenir Professeur ? Pourquoi éloigner tes enfants d’un métier où on se sent si utiles ? Pourquoi ne pas laisser tes enfants se dire en allant au boulot le matin « à mon échelle, toute petite certes mais c’est déjà ça, j’agis sur l’obscurantisme, sur le savoir vivre ensemble et peut-être, peut-être que j’arrive à ramener sur le bon chemin un, deux, et soyons fous peut-être même trois gamins ! Qui, si l’école les avait abandonnés, auraient pu se retrouver sous la coupe de personnes mal intentionnées… » Ce sentiment de pouvoir agir sur l’avenir, certes à une toute petite échelle, mais agir quand même est tellement valorisant ! Pourquoi en dissuader des jeunes ?
Maintenant, avoir envie de baisser les bras, c’est normal et on y passe tous à un moment ou un autre. Il ne faut pas regretter ces moments ni toi l’article écrit à chaud : il reflète ce que beaucoup pensent et c’est normal : on est des humains, on ressent des émotions qu’on ne souhaite pas forcément ressentir et ces moments-là aussi nous font avancer. Ce qu’il ne faut pas c’est que ce sentiment perdure. D’où mon commentaire, dans l’espoir de réveiller chez toi et chez d’autres ce qui fait que notre métier est un des plus beaux qui soit : éduquer la jeunesse. Alors oui, dans cette optique, je veux bien que tu copies mon commentaire dans un de tes articles si tu en as envie. On doit se soutenir, s’épauler, et si une personne relève la tête plus vite que les autres, à elle d’aider les autres à relever la tête aussi. Et si j’ai réussi à toucher une personne, alors c’est déjà super !
Pour ce qui est de la complexification de notre métier, je suis d’accord avec toi mais cette complexification du métier, personnellement, je la constate depuis que je suis prof. Ce n’est pas nouveau. Tu écris si le métier continue de se complexifier ainsi, jusqu’où cela va-t-il aller?Et bien je crois que ça y est : on n’y va plus, on y est. ça fait des années que notre métier se complexifie et vendredi c’est allé beaucoup trop loin. La limite est dépassée. Largement.
Tu sais quoi Claire ? Finalement, maintenant je me sens mieux ! Et c’est grâce à ton post au final ! Merci de m’avoir donné envie de réagir à ton article ! 😉 Et j’espère que ces quelques lignes t’aideront un peu à retrouver la belle confiance en l’avenir qui est la tienne. Je crois qu’on ressent tous la même douleur au fond de nous et comme tu le dis, on doit se serrer les coudes, aujourd’hui plus que jamais.
Soyons fiers de notre beau métier et transmettons cette fierté. Donnons envie aux jeunes de participer à ça, donnons-leur une possibilité d’agir, pas de subir. Notre métier est un métier d’avenir, Claire, et ne laissons pas une poignée de fous à lier nous en dissuader… Ne les laissons pas gagner.
Rhaaaaa mais re-zut, où sont-ils à nouveau passé, ces mouchoirs en papier ??? Pfff, c’est fou ces pollens en automne…
Merci, Nadia. Tu as raison, notre métier est métier d’avenir, plus que jamais : l’avenir de nos jeunes.
